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La récidive, un concept évolutif au XVIIIe siècle
Par Marie-Christine GUIOL
Publication en ligne le 25 juillet 2019
Table des matières
Texte intégral
1L’idée d’un possible amendement du coupable à travers la peine qui lui est infligée a été dégagée, pour la première fois, et déjà avec une grande netteté, par Platon. Selon lui, en effet, la peine n’est pas seulement dirigée vers la victime dans le but d’assurer son expiation, ni vers le délit afin de permettre la rétribution, mais elle s’adresse directement au coupable en vue de sa correction. La peine ne s’exécute plus alors dans une fonction afflictive ou exemplaire mais dans l’unique fin d’améliorer le criminel. L’amendement a initialement été exploité par le droit canonique1, fondé sur l’idée d’une possible amélioration du pécheur par la voie de la pénitence. Une pénitence, qui s’analyse comme la peine par excellence du droit canonique, et qui a pour objet de permettre au pécheur de se corriger afin qu’il puisse réintégrer la « communauté » à laquelle il a porté atteinte en enfreignant les lois posées par cette dernière2. Le recours à la pénitence a ainsi pour objectif le rachat du coupable.
2Mais cette finalité de la peine ne demeure pas exclusive au droit de l’Eglise. En effet, bien que tardivement, le droit laïc consacrera également l’amendement du coupable comme une finalité de la peine.
3L’affirmation de la justice distributive a engendré l’idée que l’infraction est une violation du contrat social. Pour renouer ce pacte, il faut octroyer au délinquant la possibilité de « se réconcilier » avec la société. Ainsi, la peine doit servir à rétablir le pacte social. Elle est alors toujours synonyme de rachat, mais non plus de rachat spirituel comme dans le droit de l’Eglise, mais de rachat social, utile tant pour le délinquant que pour la société. Cette notion d’amendement, qui n’est apparue que tardivement dans le droit laïc, se présente comme une finalité moderne de la peine3, et correspond à une fonction du châtiment envisagée principalement après la Révolution. Néanmoins, cette croyance en la possible amélioration du criminel sera réduite à néant dès lors que le condamné commettra, une fois sa peine purgée, un autre crime. La récidive signera alors incontestablement l’échec de son amendement.
4Celle-ci est définie par Ferrière définit comme « la rechute du coupable dans une même faute »4, et qui apparaît bien comme le signe du défaut d’amendement du criminel entre la première et la seconde infraction, dès lors qu’entre les deux crimes il a été arrêté, jugé et condamné pour le premier méfait. C’est en ce sens que de tels individus, qui apparaissent animés par le mal, sont considérés comme incorrigibles, et à ce titre punis plus sévèrement5. Cependant, la récidive n’a pas toujours été appréhendée de la même façon par la société. En effet, comme l’ancien droit ne tenait pratiquement pas compte de l’amendement du coupable, aucune théorie de la récidive n’existait6 (I). Mais après la Révolution, lorsque l’amendement du coupable devient la finalité première de la peine, une véritable théorie de la récidive est élaborée (II).
I. L’absence de théorie de la récidive dans l’ancien droit
5Sous l’Ancien Régime, aucun système général de la récidive n’avait été élaboré, et si le principe de la récidive existait, on n’en avait cependant fait que des applications limitées7. La doctrine se contentait alors d’analyser cette action du coupable comme un endurcissement dans le crime (A), et n’envisageait la récidive que comme une simple cause d’aggravation de la peine (B).
A. La récidive, signe d’un endurcissement du coupable dans le crime
6Soulignant l’échec d’une première sanction judiciaire, la récidive est considérée par la doctrine comme l’endurcissement du criminel primaire dans le crime8 : « une même infraction à l’ordre public, à la sécurité et à l’intégrité d’autrui prend une intensité supplémentaire du fait de ces attaques répétées qui ne paraissent pas éteindre la haine du criminel mais au contraire exalter davantage sa méchanceté »9. La récidive serait alors un facteur aggravant dans « l’échelle d’évaluation » du crime.
7A ce titre, Tiraqueau présente déjà l’habitudinaire endurci comme figure théologique du récidiviste10. De même Jousse, soulignant l’échec d’une pénalité corrective, remarque que « la récidive rend aussi plus coupable celui qui a déjà commis le même crime »11. Muyart de Vouglans, quant à lui, indique, dans ses Institutes au droit criminel, que « c’est aussi la quantité des crimes commis par la même personne, qui sert à rendre le dernier crime plus grave, parce qu’elle marque une envie plus déterminée de le commettre »12. Souhaitant également insister sur l’endurcissement dans le crime, De Real explique que « demeurer dans l’habitude du crime et ne pas profiter des lumières que fournit la maturité de l’âge, ce sont des circonstances qui aggravent le crime et légitiment l’arbitraire d’une peine, dont la sévérité vise à empêcher une nouvelle rechute dans la même faute »13.
8Par ailleurs, le coupable endurci dans le crime voit l’infraction réitérée plus lourdement punie en fonction de certaines circonstances aggravantes telles que son habileté, ou son sentiment subjectif d’impunité14. Ainsi, estime Jousse, « un vol réitéré plusieurs fois dans le même lieu et à de courts intervalles, n’est point égal à plusieurs vols faits en divers lieux et à des distances considérables. Le dernier cas suppose plus d’audace [...], une âme plus endurcie contre les périls et les remords. Dans l’autre le dernier vol se lie au premier ; c’est en quelque sorte le même crime continué par l’espoir et la facilité du succès »15.
9Cet endurcissement dans le crime, et donc l’aggravation de la sanction, s’observe clairement dans l’exemple rapporté par Michel Porret, d’une femme, dont le libertinage réitéré la fit expulser huit fois de Genève entre 1785 et 1787. Chaque nouvelle expulsion est marquée par un châtiment corporel supplémentaire qui vise à réprimer les nouvelles circonstances aggravantes du crime dont elle est accusée : « la première expulsion sanctionne une incrimination de prostitution punie par le fouet au bas de l’escalier des prisons […]. Au terme d’une première rupture de ban, la femme vivant toujours de son métier « infâme », est condamnée cette fois au ban perpétuel aggravé à nouveau par la fustigation non infamante. A nouveau arrêtée pour « libertinage », elle est fustigée plus solennellement dans la cour de la maison de correction, puis bannie sous la menace du fouet public et de la tonsure infamante de ses cheveux et sourcils. Toujours prostituée, elle est appréhendée à cinq reprises, et est notamment condamnée aux verges et claquemurée pendant une semaine, puis quinze jours « au pain et à l’eau ». Persévérant dans son « commerce infâme », la femme est saisie une huitième fois. [Ainsi, en raison des circonstances aggravantes] sont ajoutées au bannissement la fustigation « jusqu’à effusion de sang » au pied de la prison, l’exposition d’une heure sur le « cheval de bois » et la tonsure des cheveux et sourcils »16. Dans ce cas, il convient d’observer un réel « enracinement dans le mal » qui semble justifier une aggravation progressive de la sanction.
10Il faut par ailleurs remarquer que les récidivistes se rendaient généralement coupables d’une autre faute : l’infraction de ban17. Tel est le cas lorsque les condamnés revenaient dans le lieu proscrit malgré l’interdiction qui leur en avait été faite, comme à tout condamné. Jousse rappelle à ce sujet « qu’il est défendu à tous ceux qui ont été condamnés au bannissement par quelques juges, et de quelques lieux que ce puisse être, de se retirer pendant le temps de leur bannissement, dans la ville, Prévôté et Vicomté de Paris, ni de demeurer pendant le dit temps à la suite de la cour, ni même après le temps de leur bannissement, si outre la peine du bannissement ils avaient subi la peine du carcan, ou quelqu’autre peine corporelle ; ou s’ils avaient été condamnés deux fois au bannissement ; à peine d’être punis comme infracteur de ban »18.
11Muyart de Vouglans précise par ailleurs que lorsque les condamnés viennent à enfreindre leur ban, ils doivent être condamnés à de plus grandes peines, suivant la déclaration de 1682 qui distingue le cas où l’infraction est faite à un bannissement prononcé par jugement prévôtal, de celui où elle est faite à un bannissement prononcé par des arrêts des cours, ayant pouvoir de juger en dernier ressort : « au premier cas, elle veut que cette infraction ne puisse être punie d’une moindre peine que de celle des galères ; tandis que dans le second cas, elle laisse aux cours la faculté de prononcer une moindre peine que les galères, comme celle de prolonger la durée du bannissement s’il est à temps, le tout suivant la qualité des crimes et la condition des personnes »19. Il y a donc des degrés dans la récidive comme dans ses sanctions.
12Les auteurs considèrent en effet cette rupture de ban comme une « rébellion de justice », c’est-à-dire une action qui renverse l’ordre judiciaire, contrarie l’autorité des jugements rendus en dernier ressort, trouble la société qui demeure ainsi exposée aux agressions de ses mauvais éléments20. Aggravées par les circonstances de la récidive, les ruptures de bans sont largement imputables aux gens sans aveu tels que les mendiants, vagabonds ou prostitués qui constituent la frange marginale de la population21.
13La rupture de ban, intimement liée à la récidive, s’observe clairement par exemple dans un arrêt où l’endurcissement dans le crime apparaît à travers de nombreuses récidives : « un délinquant ayant dérobé une poule en 1778, est chassé de la ville sous peine de fustigation, puis est repris en 1779 pour le vol sur le marché d’un ballot de pièces de cuir. Après une fustigation « jusqu’au sang », l’homme est banni à perpétuité. [Deux mois plus tard,] il est arrêté à nouveau, fouetté publiquement et expulsé sous « peine des galères » pour avoir brisé son ban, dormi comme un vagabond dans des granges et volé de la farine. En 1781, une nouvelle rupture de ban conduit le délinquant à être fustigé avant d’être à nouveau banni à perpétuité »22.
14Ainsi, l’endurcissement du délinquant dans le crime s’observe clairement dans le cas de l’infraction de ban commise par le criminel. Mais, ce sont surtout les nombreuses récidives du condamné qui caractérisent cet endurcissement. En effet, celles-ci témoignent de sa dangerosité et doivent dès lors être à l’origine d’une aggravation de la peine.
B. La récidive, cause d’aggravation de la peine
15Dans l’ancien droit, la récidive était une cause d’aggravation du crime et donc de la peine. Le juge devait en tenir compte pour arbitrer le châtiment23. En ce sens, Jousse, dans le Traité de la justice criminelle, au chapitre intitulé Des causes qui peuvent contribuer à augmenter la peine, cite la récidive de l’accusé comme la première de ces causes24. Il précise, à ce titre, que « cette règle a lieu même dans le cas où l’accusé aurait été puni pour des délits ou crimes précédents »25. Relativement à cette aggravation de la peine par la récidive, Muyart de Vouglans remarque dans ses Institutes au droit criminel que « parmi les circonstances qui peuvent servir à augmenter la peine [figure] l’habitude, comme si c’est une récidive de la part de l’accusé »26. Ferrière ne pense pas différemment lorsqu’il affirme que « dans les jugements qui se rendent sur les actions ou plaintes d’injures et de mauvais traitements, on fait défense de récidiver sous plus grandes peines ou sous telles peines qu’il appartiendra »27.
16Sous l’Ancien Régime, l’aggravation de peine pour cause de récidive avait lieu dans tous les cas, et on laissait à l’arbitraire du juge le soin de mesurer cette aggravation en fonction de chaque espèce particulière. Cet arbitraire explique au fond pourquoi aucune théorie de la récidive n’a été élaborée28. Ainsi, en l’absence de tout système, la doctrine pénale se contente d’apporter un certain nombre de précisions relatives à la récidive. Jousse ne fait que mentionner, sans même les ordonner, quelques principes qu’il emprunte à Clarus29 et à Farinacius30: « quand même l’accusé aurait obtenu sa grâce pour un crime précédent, la récidive ne contribue pas moins à faire augmenter la peine […]. Quelques uns prétendent même que les délits ou crimes prescrits doivent contribuer à faire augmenter la peine contre l’accusé […]. Au reste, il faut observer que pour qu’un accusé puisse être regardé comme coupable de récidive, il faut non seulement qu’il y ait eu une information, ou même un décret pour raison de ce premier crime, mais encore que l’accusé en ait été convaincu »31.
17Muyart de Vouglans, quant à lui, précise dans ses Loix criminelles qu’il faut analyser, dans le cas de multitude de crimes commis par le même accusé, si ces crimes sont de même nature ou de genres différents, autrement dit s’il s’agit d’une récidive spéciale ou générale. Il remarque « qu’au premier cas, l’on ne peut douter qu’à cause de l’habitude et des récidives, il n’y ait lieu de punir cette personne plus sévèrement que si elle n’avait délinqué que pour la première fois […]. Mais au second cas, où la même personne serait inculpée d’avoir commis d’autres crimes que celui qui fait le titre particulier de l’accusation, il est certain que ces autres crimes ne pourraient servir à faire augmenter la peine qu’autant qu’ils auraient été déférés eux-mêmes à la justice »32.
18Cependant, malgré les positions assez tranchées de la doctrine, le vol semble être l’un des rares crimes, avec le blasphème et le crime commis par les imprimeurs, pour lesquels la récidive ait été réellement prise en compte par les textes comme cause d’aggravation de la peine33. Déjà, les anciennes coutumes tenaient compte de la récidive en prévoyant que le voleur récidiviste devait être condamné à mort : « le voleur primaire coupable d’un menu larcin n’était en général passible que d’une amende ou du fouet, mais à la deuxième fois, il perdait l’oreille, et à la troisième fois le voleur essorillé était pendu »34. Le droit coutumier médiéval ne considérait par conséquent que la récidive spéciale35, c’est-à-dire qu’il fallait que le deuxième crime soit identique au premier.
19En revanche, dès le XVIe siècle, la doctrine envisage la récidive générale dans le cas du vol dans la mesure où ces criminels invétérés, constituant un grand danger pour l’ordre social, sont considérés comme ne méritant plus aucune indulgence : « le système pénal se fait particulièrement dur envers les individus considérés comme irrécupérables par la société à savoir notamment les voleurs multirécidivistes »36. Aussi, la déclaration du 4 mars 1724 sur le vol, combinant récidive spéciale et générale, atteste de cette volonté de l’Etat de punir sévèrement la récidive37. Son article 4 est ainsi rédigé : « ceux et celles qui, après avoir été condamnés pour vol, ou flétris pour quelque crime que ce soit, seront convaincus de récidive en crime de vol, ne pourront être condamnés à moindre peine que : les hommes aux galères à temps ou à perpétuité, et les femmes à être de nouveau flétries d’un double V, si c’est pour récidive de vol, ou d’un simple V, si la première flétrissure a été encourue pour autre crime, et enfermées à temps ou pour leur vie dans des maisons de force ; le tout sans préjudice de la peine de mort, s’il y échoit, suivant l’exigence des cas. Ceux qui seront condamnés aux galères à temps ou à perpétuité pour quelque crime que ce puisse être, seront flétris avant d’y être conduits, des trois lettres GAL, pour, en cas de récidive en crime qui mérite peine afflictive, être punis de mort »38.
20Ainsi, la récidive, envisagée sous l’Ancien Régime comme une circonstance contribuant à l’aggravation de la peine, se réduisait à ces seuls éléments dégagés par la doctrine pénale et une législation tardive et parcellaire, en l’absence de toute théorie générale. L’élaboration d’une véritable théorie de la récidive n’aura finalement lieu que bien plus tard, après la Révolution.
II. L’élaboration de la théorie de la récidive après la Révolution
21Animés par l’esprit des Lumières, les Constituants n’envisagent plus la récidive comme une simple cause d’aggravation de la peine, mais ils construisent un véritable système de la récidive39, constatant ainsi, d’une certaine manière, l’échec de l’amendement. Edifier une théorie de la récidive consiste à en définir les éléments constitutifs et les caractères (A), ainsi qu’à s’intéresser à l’effet d’un tel phénomène sur la pénalité (B).
A. Les caractères de la récidive
22Ayant clairement rejeté le principe de l’arbitraire des juges, dont la justice d’Ancien Régime faisait largement usage en matière de récidive, les Constituants vont élaborer une véritable théorie de la récidive, dont rend compte le code pénal de 179140. Dans ce domaine, Le Peletier de Saint-Fargeau propose deux dispositions qui sont adoptées par l’Assemblée41.
23La première disposition est que « quiconque aura été repris de justice pour crime, s’il est convaincu d’avoir postérieurement à la première condamnation, commis un second crime emportant l’une des peines des fers, de la réclusion dans la maison de force, de la gêne, de la détention, de la dégradation civique ou du carcan, sera condamné à la peine prononcée par la loi contre le dit crime, et, après l’avoir subie, il sera transféré, pour le reste de sa vie, au lieu fixé pour la déportation des malfaiteurs »42. Cette disposition apparaît comme la première mention à l’existence d’un bagne pour les récidivistes.
24La seconde proposition formulée par Le Peletier de Saint-Fargeau aux membres de la Constituante est que « si la première condamnation n’a emporté autre peine que celle de la dégradation civique ou du carcan, et que la même peine soit prononcée par la loi contre le second crime dont le condamné est trouvé convaincu, en ce cas, le condamné ne sera pas déporté ; mais attendu la récidive, la peine de la dégradation civique ou carcan sera convertie dans celle de deux années de détention »43.
25Cette récidive, analysée par les Constituants, présente donc des caractères particuliers44. Le premier caractère est d’être cause d’aggravation de la pénalité. Il résulte des dispositions adoptées par l’Assemblée constituante que l’aggravation de la peine consécutive à la récidive s’opère de deux façons différentes : dans l’hypothèse organisée par le premier article, la pénalité est aggravée par l’adjonction à la peine ordinaire du second crime d’une peine spéciale : la déportation45. Dans l’hypothèse prévue par le second article, on aggrave la peine, non plus au moyen d’un châtiment spécial mais en passant au degré supérieur de l’échelle des peines : la conversion de la peine en deux années de détention46.
26Ainsi, la récidive apparaît désormais comme un état particulier pris en compte par les Constituants, qui nécessite une aggravation de la peine ; mais, elle n’est absolument pas perçue comme une circonstance aggravante de la seconde infraction : elle ne modifie pas la nature et les caractères intrinsèques du fait délictueux47. Cette volonté des Constituants de proscrire la récidive comme circonstance aggravante48 se montre donc conforme à leur logique pénale quant à la fixité des peines. A ce titre, Le Peletier de Saint-Fargeau explique « qu’aujourd’hui, toute nuance du fait est étrangère au juge. Il ne connaît que le fait posé par le verdict du juré. Il faut qu’il ouvre la loi, et qu’il y trouve une peine précise applicable au fait déterminé. Son seul devoir est de prononcer cette peine. Cette forme rejette sur les législateurs la nécessité de prévoir un plus grand nombre de cas, de spécifier des nuances plus variées, de déterminer plus de faits, et toujours d’être précis dans la prononciation de la peine établie par chaque article »49.
27Le deuxième caractère, propre à la récidive, telle que la conçoivent les rédacteurs du code pénal, est d’être générale. Autrement dit, tout individu condamné une première fois pour crime doit être déporté s’il en commet un second, quelles qu’en soient la nature et la peine. Ce système se fonde sur la présomption qu’un individu condamné une première fois pour crime est suffisamment averti et prémuni contre la récidive, sous toutes ses formes ; s’il recommence, il est considéré comme un incorrigible dont il faut débarrasser la société50. En ce sens, Bexon révèle, dans son Parallèle du code pénal d’Angleterre avec lois pénales françaises, le véritable motif de cette disposition voulue par les Constituants : « si celui qui a commis un crime peut encore laisser des espérances à la société ; si elle peut compter sur son repentir, et si elle a sagement dû lui offrir, dans la réhabilitation, une ressource pour reconquérir l’estime de ses concitoyens par la preuve d’une meilleure conduite, il n’en est pas de même de celui qui, après avoir été puni une fois, démontre qu’il n’a point été corrigé par un premier châtiment qui l’avait averti ». Puis il explique que la « rechute » dans le crime bannit à jamais, le coupable d’une récidive, de la société dont il s’est en quelque sorte volontairement exclu : « alors la société qui n’avait condamné [le criminel] que temporairement, dans l’espérance du repentir et d’une meilleure conduite, doit le frapper pour toujours [s’il récidive] ; il ne mérite plus la clémence de l’humanité, il a prouvé qu’il devait perdre pour jamais les avantages d’un pacte social qu’il n’a pas voulu apprendre à respecter »51.
28Enfin, le troisième caractère de la récidive est sa durée illimitée, aucune condition de temps n’étant exigée. Ainsi, contrairement à ce que prévoyait l’ancien droit, les Constituants considèrent qu’il y a récidive même si la seconde condamnation intervient longtemps après la première. Ils estiment que le souvenir du premier châtiment doit être assez fort pour écarter l’individu d’un nouveau crime à tout jamais, sinon il s’agit d’un malfaiteur incorrigible dont il faut débarrasser la société52.
29A ce sujet, Merlin, dans son Répertoire universel et raisonné de jurisprudence, rapporte un arrêt afin d’illustrer que la durée existant entre le moment où la première condamnation est intervenue et la seconde n’importe pas, pourvu que la première condamnation subsiste. L’auteur considère que l’on doit compter comme premier terme de la récidive même une condamnation intervenue bien avant la promulgation du code pénal. Il explique ainsi que cette question s’est présentée devant le tribunal de cassation à propos du pourvoi d’un nommé Charlemagne, contre un arrêt de la cour de justice criminelle du département de la Meuse du 15 prairial an VIII. Cet arrêt, après l’avoir condamné à douze mois pour tentative de vol commis la nuit dans une maison habitée et par escalade des clôtures extérieures de cette maison, avait ordonné qu’il serait déporté après avoir subi sa peine. Le pourvoi de Charlemagne fut rejeté après un rapport de Merlin. Pour prononcer la déportation, le tribunal criminel se fondait sur le fait que Charlemagne avait déjà été repris de justice pour crime de vol, s’appuyant sur deux sentences du bailliage de Châlons-sur-Marne, l’une du 16 mai 1776, et l’autre du 8 juin 1785. Le pourvoi soutenait qu’il y avait là une fausse interprétation de la loi. Merlin démontra au contraire que Charlemagne se trouvait bien dans le cas prévu par les dispositions élaborées par les membres de l’Assemblée constituante, qui n’exigeaient en effet que deux conditions : que l’individu auquel il s’agit d’appliquer la déportation ait été repris de justice pour crime, et qu’il soit convaincu d’avoir, postérieurement à la première condamnation, commis un deuxième crime emportant l’une des peines énumérées par ce texte. Or ces deux conditions se rencontraient ici, sans qu’une condition de durée entre les deux condamnations n’ait à intervenir53.
30Ainsi, il apparaît clairement que les caractères de la récidive ont été déterminés à partir des dispositions votées par les membres de l’Assemblée constituante. Cependant, pour élaborer une théorie de la récidive complète, restait encore à considérer l’effet de celle-ci sur la pénalité.
B. L’effet de la récidive sur la pénalité
31Depuis le début du XVIIIe siècle, dans toute l’Europe, se pose la question de la récidive, si bien que diverses solutions ont été envisagées pour écarter les récidivistes de la société54. Depuis longtemps, les Anglais usent d’une peine qui a pour effet de débarrasser radicalement le pays des récidivistes : la déportation55. Cette peine est infligée aux récidivistes, dans un territoire à coloniser, une fois leur seconde peine accomplie. De 1718 à 1776, les individus récidivistes ont été envoyés aux Antilles et dans les colonies de l’Amérique du Nord ; et depuis 1788, la transportation a eu lieu essentiellement vers l’Australie56.
32C’est sous l’influence anglo-saxonne que les Constituants consacrent la déportation comme peine de la récidive57. Mais, si le principe de la déportation est voté sans discussion par les membres de l’Assemblée constituante, il en va autrement de la proposition excluant la déportation dans le cas de simples condamnations à des peines infamantes58. En effet, le vote de cette disposition suscite un vif débat au sein même de l’Assemblée.
33La discussion débute par la prise de parole de Duport, pour qui le maintien de la déportation paraît indispensable même en cas de condamnations à peines infamantes. Pour justifier son raisonnement, l’orateur s’appuie sur la loi de 1724 qui prévoyait la peine de mort dans le cas de récidive : « la peine de récidive était, par la loi de 1724, presque toujours la mort […]. On avait donc établi un très bon principe, mais on en avait tiré une conséquence atroce […] car il ne faut pas condamner un homme à mort parce qu’il a été repris une seconde fois. Je pense qu’il doit être déporté ; et si, pour cette récidive, vous ne le condamnez qu’au carcan et qu’il rentre pour une troisième fois dans la société, vous êtes sûrs qu’il commettrait les mêmes désordres »59.
34Prieur60 se prononce dans le même sens que Duport, se fondant néanmoins sur un raisonnement différent. L’orateur commence par s’interroger sur le fait de savoir si la société doit réintégrer en son sein un individu qui a récidivé, dans le cas de condamnation à simples peines infamantes : « il s’agit de savoir si, après avoir été dégradé civilement, cet homme, ne profitant pas de la correction que la société lui a donnée, retombe encore dans le crime ; il s’agit de savoir si la société peut encore le recevoir dans son sein ». Puis, il affirme qu’un tel individu doit nécessairement être exclu de la société, au moyen de la déportation, qu’il tente de relativiser : « s’il s’agissait d’appliquer à la récidive toute peine de mort, il y aurait sans doute beaucoup à balancer ; mais prenez garde ici qu’il ne s’agit que de la simple déportation, c’est-à-dire d’adopter une proposition qui tend à purger le corps social de voir les individus qui la déshonorent et la troublent sans cesse »61. La déportation est alors présentée comme garante de tranquillité sociale.
35En revanche, d’autres Constituants se montrent radicalement hostiles à la déportation dans le cas de condamnations à simples peines infamantes. Telle est l’opinion de Le Peletier de Saint-Fargeau pour qui il s’agit de savoir « si le condamné qui est repris de justice et qui mérite une peine infamante, c’est-à-dire la peine de la dégradation civique, sera déporté pour la récidive, c’est-à-dire s’il éprouvera une espèce de mort civile ou bien si sa punition sera aggravée ». Pour répondre à cette question, l’orateur remarque qu’il faut nécessairement savoir à quel crime s’applique la dégradation civique : « elle s’applique à un très petit nombre de cas. Elle ne s’applique point aux violences, elle ne s’applique point au vol, elle s’applique à quelques actions de bassesse »62. C’est alors toute l’échelle des peines qui est ici remise en cause.
36De même, Legrand63, qui s’exprime de manière brève, demande que la récidive de la dégradation civique soit « dans tous les cas, punie de deux ans de détention, et que la déportation ne puisse avoir lieu que pour les délits qui auraient éprouvé une détention de deux ans ». Il propose donc pour amendement que « la déportation ne puisse avoir lieu que pour la récidive après deux ans de détention »64.
37Enfin, avant que les propositions ne soient votées et le débat sur la récidive clos, le député Bouche fait remarquer avec raison que ce projet est lacunaire. En effet, si les dispositions relatives à la récidive substituent habilement la déportation à la peine de la marque, elles ne prévoient cependant pas de système permettant la reconnaissance des récidivistes. Le Constituant déclare à cet égard : « hier on demanda au comité de Constitution quelles voies on pourrait employer pour reconnaître ceux qui avaient commis une première faute, il répondit qu’il n’y en avait point […]. Il serait important que notre Comité de Constitution mît sous vos yeux un moyen quelconque de pouvoir reconnaître la récidive ». L’orateur illustre ses propos par un exemple, fort judicieux, qui rend compte de la terrible carence législative : « un homme se rendra coupable, par exemple, dans le département du Var, du crime qui méritera la peine de la récidive ; il ira ensuite dans le département du Morbihan commettre le même crime, voilà certainement une récidive, mais où les preuves de la récidive se trouveront-elles ? Il s’en suivra de là que cet homme sera puni une seconde fois comme s’il n’était coupable que pour la première »65.
38Au-delà de ces considérations particulières, il faut retenir pour l’essentiel qu’en 1791, les Constituants font de l’amendement du coupable leur objectif premier, en rendant les châtiments plus humains, en supprimant toute marque extérieure capable de rappeler la première faute, en enseignant au coupable le travail pour lui permettre plus tard de gagner sa vie, et en l’isolant dans les cas graves. Ils pensent ainsi mettre en œuvre tous les moyens capables de susciter le repentir et d’assurer le relèvement du coupable ; et c’est pour cette raison qu’ils punissent sévèrement ceux qui commettent de nouveaux crimes, considérés comme des incorrigibles. Mais, ce faisant, ils sont cependant beaucoup moins rigoureux que l’ancien droit qui aggravait la peine quel que fût le genre de récidive. Ce constat relève incontestablement d’une logique pénale différente. En effet, si après la Révolution, l’amélioration du coupable apparaît comme la clef de voûte du nouveau système pénal, sous l’Ancien Régime, l’amélioration du coupable était un objectif inexistant et son éventuelle réhabilitation au sein de la société n’était d’ailleurs nullement envisagée. Seule comptait la punition du coupable, qui devait nécessairement expier sa faute et constituer un exemple pour ceux qui étaient tentés de l’imiter.
39Cet intérêt porté à la question de la récidive connaîtra son apogée au cours du XIXe siècle. En effet, une prise de conscience générale s’opère avec le développement des statistiques criminelles. La récidive devient alors la principale question qui anime les politiques pénales de la seconde moitié du XIXe siècle et qui conduira également au déterminisme pénal. Autrement dit, la « théorie de la récidive », telle qu’appréhendée par la doctrine et les Constituants au XVIIIe siècle, laissera progressivement place à une véritable « obsession de la récidive »66 au cours du siècle suivant.
Notes
1 NAZ (R.), Traité de droit canonique, Letouzey et Ané, Paris, 1948, tome 1, p. 9-18 ; THEPHANY (J.-M.), Exposition du droit canonique selon la méthode des décrétales de Grégoire IX, Bloud et Barral, Paris, 1898, p. 2-15.
2 Pour Karl Rahner, la pénitence désigne « l’attitude morale et religieuse juste de l’homme envers le péché, attitude qui est un don de la grâce du Christ. L’acte capital de la pénitence est le repentir […]. La pénitence n’est pas seulement une expérience passive ; précisément comme don de Dieu, elle est un acte de l’homme : l’homme se détourne de son passé qui « fait mal » » : RAHNER (K.), Petit dictionnaire de théologie catholique, Seuil, Paris, 1995, p. 351. Sur cette question : NAZ (R.), Traité de droit canonique, op.cit., tome 4, p. 698 ; PELLE (P.), Le droit pénal de l’Eglise, Lethielleux, Paris, 1939, p. 182-183 ; VACANT (A.), Dictionnaire de théologie catholique, Letouzey et Ané, Paris, 1938, tome 12, p. 722-747.
3 Le Professeur Laingui observe qu’au XVIIe siècle, l’amendement est une finalité de la peine qui « sans être secondaire témoigne de l’influence exercée par le droit canonique sur la législation civile, mais ne prend toute son importance qu’à la fin du XVIIIe siècle » : LAINGUI (A.), « Nouveauté et permanence dans le droit criminel au XVIIe siècle », Destins et enjeux du XVIIe siècle, Textes réunis en hommage à Jean Mesnard, P.U.F., Paris, 1985, p. 80.
4 FERRIERE (C.-J. de), Dictionnaire de droit et de pratique, Brunet, Paris, 1769, tome 2, p. 450. A cet égard : LEBIGRE (A.), Cours d’histoire du droit pénal, Faculté de droit, Sceaux, 1976, p. 21 ; LEGRI (V.), De la récidive en droit romain et en droit français, Hommais, Caen, 1868, p. 16. Relativement à la notion même de récidive, Valérie Toureille observe que « le concept moderne de récidive possède des racines profondes qui viennent s’ancrer dans la tradition théologique et juridique de la pensée médiévale […]. Dès les premiers siècles du Moyen Age, la notion emprunte un cheminement complexe. Elle s’ébauche alors progressivement et maladroitement. D’ailleurs le terme de récidive n’existe pas […]. Au cours du Moyen Age, l’incorrigibilité, définie par les hommes d’Eglise à l’usage des clercs, glisse progressivement dans le vocabulaire des laïcs, en particulier celui des criminalistes, lorsqu’ils cherchent à qualifier le comportement des criminels endurcis et qu’ils tentent de justifier leur exclusion […]. Si le Moyen Age n’a pas inventé le concept de récidive, son origine est incontestablement médiévale » : TOUREILLE (V.), « Larrons incorrigibles et voleurs fameux. La récidive en matière de vol ou la consuetudo furandi à la fin du Moyen Age », in BRIEGEL (F.), PORRET (M.) (sous la dir. de), Le criminel endurci : récidive et récidivistes du Moyen Age au XXe siècle, Droz, Genève, 2006, p. 43 et 53. Egalement sur le concept de récidive : BRIEGEL (F.), WENZEL (E.), « La récidive à l’épreuve de la doctrine pénale (XVIe-XIXe siècles) », in BRIEGEL (F.), PORRET (M.) (sous la dir. de), Le criminel endurci : récidive et récidivistes du Moyen Age au XXe siècle, Droz, Genève, 2006, p. 93, ALLINNE (J.-P.), SOULA (M.) (sous la dir. de), Les récidivistes : représentations et traitements de la récidive, XIXe-XXIe siècle, Actes du colloque international de Pau (9-10 décembre 2009), Presses Universitaires de Rennes, Rennes, 2010 ; NICOLLEAU (L.), La récidive au XIXe siècle, Thèse de doctorat, Droit, Université de Dijon, 2007.
5 Abba Hassas Khodravech remarque que « le juge ne doit être autorisé à punir avec une sévérité exceptionnelle qu’autant que la répression a été inutile et que les condamnations précédentes étaient demeurées sans effet, le coupable révèlant une incorrigible perversité » : HASSAS KHODRAVECH (A.), La récidive, cause d’aggravation de la peine en droit pénal français, Thèse de doctorat, Droit, Université de Paris, 1962, p. 5-6. Egalement : BEKAERT (H.), Les principes de la récidive dans le droit pénal classique, Rega, Louvain, 1939, p. 16.
6 BOSCREDON (L.), De la récidive en droit romain et en droit français, Thèse de doctorat, Droit, Université de Toulouse, 1880, p. 36.
7 DUMANS (J.), De la récidive, Blanc-Hardel, Caen, 1875, p. 54-72.
8 HASSAS KHODRAVECH (A.), La récidive, cause d’aggravation de la peine en droit pénal français, op.cit., p. 3.
9 GONTHIER (N.), Le châtiment du crime au Moyen Age, Presses universitaires de Rennes, Rennes, 1998, p. 25.
10 TIRAQUEAU (A.), De Poenis Temperandis, 1559, Economica, Paris, 1986, p. 80-81. Egalement sur ce point : LAINGUI (A.), « L’homme criminel dans l’ancien droit », Revue de sciences criminelles et de droit comparé, Paris, 1983, p. 28. Il convient d’observer que, sur la question de la récidive, la doctrine du XVIIIe siècle se référera largement à Tiraqueau, grand juriste du XVIe siècle, et à son De poenis temperandis : GANDER (D.), « La répression pénale des récidivistes à Genève au XVIIIe siècle : statistiques et études de cas », in BRIEGEL (F.), PORRET (M.) (sous la dir. de), Le criminel endurci : récidive et récidivistes du Moyen Age au XXe siècle, Droz, Genève, 2006, p. 137.
11 JOUSSE (D.), Traité de la justice criminelle, Debure, Paris, 1771, partie 1, titre 1, p. 12.
12 MUYART DE VOUGLANS (P.-F.), Institutes au droit criminel ou principes généraux sur ces matières, Le Breton, Paris, 1757, partie 1, chapitre 3, p. 22.
13 DE REAL (G.), La science du gouvernement, Libraires associés, Paris, 1762-1764, p. 401.
14 BRIEGEL (F.), PORRET (M.) (sous la dir. de), Le criminel endurci : récidive et récidivistes du Moyen Age au XXe siècle, Droz, Genève, 2006, p. 15 ; SBRICCOLI (M.), « Juristes et juges face à l’image du criminel méchant et endurci (XIVe-XVIe siècles) », in BRIEGEL (F.), PORRET (M.) (sous la dir. de), Le criminel endurci : récidive et récidivistes du Moyen Age au XXe siècle, Droz, Genève, 2006, p. 26-27.
15 JOUSSE (D.), Traité de la justice criminelle, op.cit., partie 3, titre 25, p. 602. Egalement sur ce point : DURAND (B.), « Jousse, la récidive et Farinacius », in LEVELEUX-TEIXEIRA (C.) (sous la dir. de), Daniel Jousse : un juriste au temps des Lumières (1704-1781), C.I.A.J. n° 16, Pulim, Limoges, 2007, p. 106-107.
16 Michel Porret rapporte un autre exemple bien représentatif de ce modèle de l’endurcissement criminel : « en 1771, guidé dans son réquisitoire par une évaluation sévère des circonstances prouvant une récidive, le Procureur général Galiffe obtient la pendaison de Jean-Louis Cagnoux, délinquant professionnel, spécialisé dans l’effraction des demeures patriciennes. Condamné une première fois en 1768, ce voleur « endurci dans le crime » est arrêté à nouveau en mai 1770 pour le même délit, sanctionné alors par un bannissement perpétuel. Brisant son ban en septembre 1770, le voleur est repris, fustigé sur la place du Molard et banni encore une fois à perpétuité sous peine d’une fustigation publique infligée sur les carrefours et les places de la ville. En 1771, récidivant dans ses vols qualifiés, l’homme est pendu le 5 avril, malgré un recours en grâce rédigé par l’avocat Jacques-Antoine Du Roveray ». L’auteur poursuit avec l’exemple des vols réitérés commis durant six mois par Antoine Valentin, soldat dans la garnison, « qui pille boutiques et caves de la cité à une quinzaine de reprises entre 1733 et 1734, légitiment la peine capitale que motive le procureur général Trembley qui y voit une « criminelle habitude » ; le réquisitoire du magistrat retient à charge comme circonstances aggravantes l’usage de fausses clefs, le statut du militaire, la nuit, le caractère professionnel des délits et l’absence de « nécessité » dans le mobile du crime. Ces vols sont répétés. Ils annoncent non pas une surprise mais une habitude enracinée » : PORRET (M.), Le crime et ses circonstances. De l’esprit de l’arbitraire au siècle des Lumières selon les réquisitoires des procureurs généraux de Genève, Droz, Genève, 1995, p. 142-143 et 146.
17 AUBRY (G), La jurisprudence criminelle du Châtelet de Paris sous le règne de Louis XVI, L.G.D.J., Paris, 1971, p. 221.
18 JOUSSE (D.), Traité de la justice criminelle, op.cit., partie 1, titre 3, p. 53-54.
19 L’auteur rappelle les dispositions de la déclaration du 31 mai 1682 : « nous avons été informés que la plupart des voleurs et autres gens de mauvaise vie qui ont été repris de justice et bannis, n’étaient pas intimidés par cette peine, non seulement retournent dans les pays et lieux d’où ils ont été chassés, mais continuent à vivre dans les mêmes crimes ; à quoi ils sont excités par le relâchement des juges, qui n’ont pas exercé à leur égard le châtiment sévère qu’ils ont encouru suivant les anciennes ordonnances ; et d’autant que nous ne pouvons prendre trop de soin pour assurer le repos de nos sujets, et leur donner moyen de vaquer à leur commerce en liberté, nous avons résolu d’y pourvoir. A ces causes, et autres à ce nous mouvant, de notre certaine science, pleine puissance et autorité royale, nous avons par ces présentes, signées de notre main, dit, déclaré et ordonné, disons, déclarons et ordonnons, voulons et nous plaît, que tous ceux qui ont été bannis par sentence prévôtale, ou jugement présidial rendu en dernier ressort, et qui seront repris, quand même ce ne serait que faute d’avoir gardé leur ban seulement, sans qu’il soit en la liberté des juges de modérer cette peine, mais bien de l’arbitrer à temps, ou à perpétuité selon qu’ils l’estimeront à propos ; et quant à ceux qui auront été bannis par des arrêts de nos cours, et qui seront pareillement repris pour n’avoir pas gardé leur ban, nous laissons à nos dites cours et autres nos juges ayant pouvoir de juger en dernier ressort, la liberté d’ordonner de leur châtiment, eu égard à la qualité des crimes pour lesquels ils auront été bannis, et à la condition des personnes. Voulons au surplus que les ordonnances contre les vagabonds et gens sans aveu, soient exécutées selon leur forme et teneur » : MUYART DE VOUGLANS (P.-F.), Les loix criminelles de France dans leur ordre naturel, Mérigot le jeune, Paris, 1780, livre 2, titre 4, p. 63-64.
20 Jousse envisageant l’infraction de ban comme une rébellion de justice, précise que « tout juge connaît de l’infraction de ban, dans le cas où le bannissement a été prononcé par lui. Mais il est autrement, si le jugement a été confirmé par arrêt de la cour, parce qu’alors c’est au Parlement à connaître de cette infraction » : JOUSSE (D.), Traité de la justice criminelle, op.cit., partie 2, titre 2, p. 469.
21 MUYART DE VOUGLANS (P.-F.), Les loix criminelles de France dans leur ordre naturel, op.cit., livre 2, titre 4, p. 63. Sur cette frange marginale de la société : RUSCHE (G.), KIRCHHEIMER (O.), Peine et structure sociale, Cerf, Paris, 1994, p. 158-168 ; GEREMEK (B.), « Criminalité, vagabondage, paupérisme : la marginalité à l’aube des temps modernes », Revue d’histoire moderne et contemporaine, Paris, 1974, pp. 337-375 ; SCHNAPPER (B.), « La répression du vagabondage et sa signification historique du XIVe au XVIIIe siècle », in SCHNAPPER (B.), Voies nouvelles en histoire du droit. La justice, la famille, la répression pénale (XVIème-XXème siècles), P.U.F., Paris, 1991, p. 45-51.
22 « Contre cet ennemi public "absolument voué au vice" car "six fois coupable et cinq fois puni par la justice", le procureur général avait pourtant réclamé un ban perpétuel aggravé de dix années "comme forçat à la chaîne sur les galères" » : PORRET (M.), Le crime et ses circonstances. De l’esprit de l’arbitraire au siècle des Lumières selon les réquisitoires des procureurs généraux de Genève, op.cit., p. 138-139.
23 BRIEGEL (F.), PORRET (M.), Le criminel endurci : récidive et récidivistes du Moyen Age au XXe, op.cit.,p. 12 ; BONNEVILLE DE MARSANGY (A.), De la récidive, Paris, 1841, p. 183 ; BOSCREDON (L.), De la récidive en droit romain et en droit français, op.cit., p. 45 ; EYQUEM (A.), De la récidive en droit français, Duverdier, Bordeaux, 1877, p. 92 ; LEGRI (V.), De la récidive en droit romain et en droit français, op.cit., p. 37-38 ; OLLIVIER (L.-F.-M.), De la récidive en droit romain et droit français, Oberthür et fils, Rennes, 1877, p. 57 ; ULRICH (D.), « La répression en Bourgogne au XVIIIe siècle », RHD, Paris, 1972, p. 426-428 ; SBRICCOLI (M.), « Juristes et juges face à l’image du criminel méchant et endurci (XIVe-XVIe siècles) », op.cit., p. 26 ; ROUSSEAUX (X.), « La récidive : invention médiévale ou symptôme de modernité ? », in BRIEGEL (F.), PORRET (M.) (sous la dir. de), Le criminel endurci : récidive et récidivistes du Moyen Age au XXe siècle, Droz, Genève, 2006, p. 56-57.
24 L’auteur indique à ce sujet « qu’outre les circonstances qui contribuent à augmenter la gravité du crime, et qui méritent par conséquent une peine plus sévère, en voici encore quelques autres qui peuvent contribuer à faire augmenter la peine. La première de ces circonstances est la récidive » : JOUSSE (D.), Traité de la justice criminelle, op.cit., partie 3, titre 25, p. 601. A cet égard : DURAND (B.), « Jousse, la récidive et Farinacius », op.cit., p. 106.
25 Ibidem Jousse.
26 MUYART DE VOUGLANS (P.-F.), Institutes au droit criminel ou principes généraux sur ces matières, op.cit., partie 8, chapitre 2, p. 392. Sur ce point : GARNOT (B.), PIANT (H.), « Récidive, justice et opinion en Bourgogne et en Lorraine du milieu du XVIIe siècle à la fin du XVIIIe siècle » in BRIEGEL (F.), PORRET (M.) (sous la dir. de), Le criminel endurci : récidive et récidivistes du Moyen Age au XXe siècle, Droz, Genève, 2006, p. 123.
27 FERRIERE (C.-J. de), Dictionnaire de droit et de pratique, op.cit., tome 2, p. 450. Voir également : FURETIERE (A.), Dictionnaire, Chez Arnout et Reinier Leers, La Haye-Rotterdam, 1690, p. 1743.
28 MASSON (L.), La Révolution pénale en 1791 et ses précurseurs, Thèse de doctorat, Droit, Université de Nancy, 1899, p. 184.
29 Julius Clarus, né à Alexandrie en 1525, et mort en 1575, conseiller à Milan, est l’auteur du célèbre ouvrage, Practica Criminalis. Pour Jousse, cet auteur « peut être regardé comme le meilleur de tous ceux qui ont écrit sur les matières criminelles, par la clarté et la précision qui règnent dans son ouvrage » : JOUSSE (D.), Traité de la justice criminelle, op.cit., préface, p. 47.
30 Prosper Farinacius, jurisconsulte romain, né en 1544, et mort en 1618, est l’auteur de Praxis et theoria criminalis, et alia opera criminalia. Jousse considère cet auteur comme un « très excellent criminaliste, [ayant] traité le plus amplement des matières criminelles. [Il précise que] son ouvrage renferme plutôt des questions détachées, qu’un traité suivi et méthodique ; mais les questions qu’il agite y sont traitées dans toute leur étendue, et d’une manière à ne rien désirer » : Ibidem, p. 48.
31 L’auteur ajoute au sujet du récidiviste précédemment grâcié : »ceux qui ont déjà obtenu leur grâce pour un crime et qui veulent l’obtenir encore pour un second crime, sont obligés dans la requête qu’ils présentent de faire mention de cette première grâce qu’ils ont obtenue ; à peine de nullité des lettres qu’ils obtiendront ensuite » : Ibidem, partie 3, titre 25, p. 602.
32 Muyart de Vouglans conclut son développement en affirmant « qu’il faut néanmoins excepter le cas où le crime, qui ferait l’objet de l’accusation principale, en aurait entraîné lui-même plusieurs autres à la fois, comme lorsque le vol se trouve joint au faux, et à l’homicide » : MUYART DE VOUGLANS (P.-F.), Les loix criminelles de France dans leur ordre naturel, op.cit., livre 1, titre 4, p. 22.
33 MASSON (L.), La Révolution pénale en 1791 et ses précurseurs, op.cit., p. 184.
34 CARBASSE (J.-M.), Histoire du droit pénal et de la justice criminelle, P.U.F., Paris, 2000, p. 331.
35 Aussi, Michel Porret souligne que « le juge doit attentivement considérer les caractères de la récidive. Quand on songe à qui et par qui et dans quel moment a été fait ce second vol, quelle férocité, quel acharnement, quelle noire intrépidité, quelle incorrigibilité il suppose nécessairement, la méchanceté de Rossignol fait plus que le supplément de son âge ; et si l’on y joint la considération que son premier vol méritait la mort, et que le jugement qui l’y condamnera peut-être exécuté sur sa personne, on sentira que la peine capitale est due à l’éclat qu’à fait ce vol et à la nécessité de l’exemple » : PORRET (M.), Le crime et ses circonstances. De l’esprit de l’arbitraire au siècle des Lumières selon les réquisitoires des procureurs généraux de Genève, op.cit., p. 138. Egalement : BOUBEE (R.), De la récidive, Thèse de doctorat, Droit, Université de Toulouse, 1864, p. 4. Sur la récidive et les coutumes sous l’Ancien Régime : BOSCREDON (L.), De la récidive en droit romain et en droit français, op.cit., p. 50-52 ; OLLIVIER (L.-F.-M.), De la récidive en droit romain et droit français, op.cit., p. 62.
36 GARNOT (B.), Justice et société en France aux XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, Gap, Ophrys, 2000, p. 179. Egalement : GARNOT (B.), Crime et justice aux XVIIe et XVIIIe siècles, Imago, Paris, 2000, p. 73. Le Professeur Carbasse remarque que c’est en raison de cet accroissement de la sévérité à l’égard des récidivistes que l’ordonnance de 1670 a donné compétence aux prévôts des maréchaux sur tous les délinquants récidivistes : CARBASSE (J.-M.), Histoire du droit pénal et de la justice criminelle, op.cit., p. 233. Sur l’action répressive de la justice prévôtale : CASTAN (N.), « La justice expéditive », A.E.S.C., Paris, 1976, p. 331-352 ; LORGNIER (J.), MARTINAGE (R.), « Procédure criminelle et répression devant la maréchaussée de Flandres (1679-1790) », RHD, Paris, 1981, p. 193-197 ; LORGNIER (J.), « Abus et conflits de compétence. Sources de progrès de la procédure prévôtale aux XVIe et XVIIe siècles », in HOAREAU-DODINAU (J.), TEXIER (P.) (sous la dir. de), Pouvoir, justice et société, C.I.A.J. n° 4, Pulim, Limoges, 2000, p. 170.
37 BEKAERT (H.), Les principes de la récidive dans le droit pénal classique, op.cit., p. 46 ; LEGRI (V.), De la récidive en droit romain et en droit français, op.cit., p. 36-37 ; ROUSSEAUX (X.), « La récidive : invention médiévale ou symptôme de modernité ? », op.cit., p. 74 ; BRIEGEL (F.), WENZEL (E.), « La récidive à l’épreuve de la doctrine pénale (XVIe-XIXe siècles) », op.cit., p. 98 ; GANDER (D.), « La répression pénale des récidivistes à Genève au XVIIIe siècle : statistiques et études de cas », op.cit., p. 139. Voir aussi sur la législation royale en matière de récidive : BONNEVILLE DE MARSANGY (A.), De la récidive, op.cit., p. 268-283 ; BOSCREDON (L.), De la récidive en droit romain et en droit français, op.cit., p. 52-68 ; BOUBEE (R.), De la récidive, op.cit., p. 14-15 ; LEGRI (V.), De la récidive en droit romain et en droit français, op.cit., p. 37-42 ; OLLIVIER (L.-F.-M.), De la récidive en droit romain et droit français, op.cit., p. 64-66.
38 DU ROUSSEAUD DE LA COMBE (G.), Traité des matières criminelles, Théodore Le Gras, Paris, 1768, partie 4, p. 118 ; SOULATGES (J.-A.), Traité des crimes, Antoine Birosse, Toulouse, 1762, tome 1, partie 1, chapitre 6, p. 189 ; JOUSSE (D.), Traité de la justice criminelle, op.cit., partie 4, titre 57, p. 171 ; ISAMBERT (F.-A.), Recueil général des anciennes lois françaises depuis l’an 420 jusqu’à la Révolution de 1789, Belin le Prieur, Paris, 1823-1828, p. 260. De plus, ces auteurs précisent que l’article 6 de cette déclaration porte que « l’article 4 sera exécuté encore que les accusés eussent obtenu des lettres de rappel de ban, ou de galères, ou de commutation de peines pour d’autres vols précédents, ou autres crimes ».
39 DUMANS (J.), De la récidive, op.cit., p. 73-82 ; OLLIVIER (L.-F.-M.), De la récidive en droit romain et droit français, op.cit., p. 67.
40 BONNEVILLE DE MARSANGY (A.), De la récidive, op.cit., p. 379-402 ; BRIEGEL (F.), PORRET (M.), Le criminel endurci : récidive et récidivistes du Moyen Age au XXe siècle, op.cit., p. 18 ; LEGRI (V.), De la récidive en droit romain et en droit français, op.cit., p. 48 ; BRIEGEL (F.), WENZEL (E.), « La récidive à l’épreuve de la doctrine pénale (XVIe-XIXe siècles) », op.cit., p. 105.
41 MARTINAGE (R.), « Les innovations des Constituants en matière de répression », in BADINTER (R.) (sous la dir. de), Une autre Justice, Fayard, Paris, 1989, p. 121.
42 Archives Parlementaires de 1787 à 1860, rapportées par Jérôme Madival et Emile Laurent, Dupont, Paris, 1867, tome 26, p. 739. Sur ce point : LEGRI (V.), De la récidive en droit romain et en droit français, op.cit., p. 48.
43 Ibidem Archives Parlementaires.
44 BOUBEE (R.), De la récidive, op.cit., p. 16-53.
45 MARTINAGE (R.), La fonction des peines à la fin du XVIIIe siècle, Cours d’histoire du droit pénal, Lille, 1973, p. 139 ; MASSON (L.), La Révolution pénale en 1791 et ses précurseurs, op.cit., p. 185.
46 Ibidem Masson, p. 186.
47 Cependant, il n’en était pas de même pendant la période intermédiaire. En effet, l’article 27, IIe partie, titre 7 de la loi du 16-29 septembre 1791 intégralement reproduit par l’article 375 du code du 3 brumaire an IV, exige expressément qu’une question spéciale soit posée au jury sur la récidive : « dans les délits, dit-il, qui renferment des circonstances indépendantes les unes des autres, comme dans une accusation de vol, pour savoir s’il a été commis la nuit, avec effraction, par une personne domestique avec récidive […]. Les questions relatives à ces circonstances sont présentées chacune séparément, sans qu’il soit nécessaire de commencer par les moins aggravantes ». Ce texte fait donc de la récidive une circonstance aggravante de l’infraction sur laquelle le jury doit statuer et en vertu de cet article le tribunal de cassation a toujours annulé les jugements rendus sans que le jury ait été interrogé sur la récidive. Il s’est expliqué sur ce point surtout dans un arrêt du 18 floréal an VII : MERLIN (P.-A.), Répertoire universel et raisonné de jurisprudence, Garnery, Paris, 1807-1825, p. 522.
48 Sous l’ancien droit, la récidive était considérée comme une circonstance aggravante ; et la peine encourue par le récidiviste était laissée à l’arbitraire du juge.
49 Archives Parlementaires de 1787 à 1860, op.cit., tome 26, p. 828.
50 MASSON (L.), La Révolution pénale en 1791 et ses précurseurs, op.cit., p. 185.
51 BEXON (S.-J.), Parallèle du code pénal d’Angleterre avec lois pénales françaises et considération sur les moyens de rendre celles-ci plus utiles, Fauvelle et Sagnier, Paris, 1800, p. 345.
52 MASSON (L.), La Révolution pénale en 1791 et ses précurseurs, op.cit., p. 185. Egalement à ce sujet : REMY (H.), Les principes généraux du code pénal de 1791, Thèse de doctorat, Droit, Université de Paris, 1904, p. 178.
53 MERLIN (P.-A.), Répertoire universel et raisonné de jurisprudence, op.cit., p. 603.
54 CARBASSE (J.-M.), Histoire du droit pénal et de la justice criminelle, op.cit., p. 411. Egalement à ce sujet : ROUSSEAUX (X.), « La récidive : invention médiévale ou symptôme de modernité ? », op.cit., p. 55 ; GANDER (D.), « La répression pénale des récidivistes à Genève au XVIIIe siècle : statistiques et études de cas », op.cit., p. 137.
55 Ibidem Carbasse. Sur les débuts de la déportation des criminels : RUSCHE (G.), KIRCHHEIMER (O.), Peine et structure sociale, op.cit., p. 188-193.
56 BLOSSEVILLE (E.-P. de), Histoire de la colonisation pénale et des établissements de l’Angleterre en Australie, Hérissey, Evreux, 1859 ; CUNIQUE (P.-P.), Le bagne de 1852 à 1953, Thèse de doctorat, Droit, Université de Perpignan, 2004, p. 45-46 ; LA PILORGERIE (J. de), Histoire de Botany-Bay, état présent des colonies pénales de l’Angleterre dans l’Australie ou examen des effets de la déportation, considérée comme peine et comme moyen de colonisation, Paulin, Paris, 1836.
57 JULLIENNE (E. de), De la transportation et de la déportation à introduire dans notre système pénal pour remédier aux dangereux effets de la pénalité, Veuve Tavernier, Aix, 1849. Relativement à la peine de la déportation : LASCOUMES (P.), PONCELA (P.), « Classer et punir autrement : les incriminations sous l’Ancien Régime et sous la Constituante », in BADINTER (R.) (sous la dir. de), Une autre justice (1789-1799), Fayard, Paris, 1989, p. 96 ; LASCOUMES (P.), PONCELA (P.), « Des délits et des peines sous la Constituante », Archives de politique criminelle, Paris, 1989, n° 11, p. 19 ; SICARD (G.), « La Révolution française et les peines : les débats à l’Assemblée nationale Constituante (mai-juin 1791) », Estudios de historia del derecho europeo : homenaje al Profesor G. Martinez Diez, Madrid, volume 2, p. 83 ; BRIEGEL (F.), WENZEL (E.), « La récidive à l’épreuve de la doctrine pénale (XVIe-XIXe siècles) », op.cit., p. 105.
58 Sur les deux propositions de Le Peletier de Saint-Fargeau : supra, p. 351.
59 Duport commence par rappeler quel est le principe de la déportation : « c’est lorsqu’une fois un homme a été repris et condamné, la société n’espérant plus de lui aucune espèce d’amendement, ne peut plus le laisser subsister parmi elle » : Archives Parlementaires de 1787 à 1860, op.cit., tome 26, p. 739.
60 Pierre-Louis Prieur, avocat à Châlons-sur-Marne avant la Révolution, est élu par ce bailliage aux Etats généraux : LEMAY (E.-H.), Dictionnaire des Constituants (1789-1791), op.cit., p. 772-775.
61 Archives Parlementaires de 1787 à 1860, op.cit., tome 26, p. 739.
62 Le rapporteur poursuit en donnant des exemples pour illustrer ses propos : « l’homme qui viole le secret d’une lettre par exemple, fait une infamie, et en conséquence il est dans le cas de la dégradation civique. Or, voulez-vous messieurs que cet homme qui a commis ce délit, qui s’est flétri dans la société, lui voulez-vous imprimer la mort civile, voulez-vous arracher cet homme à son pays ? Voici un autre cas, c’est celui qui insulte, d’une manière grave, un fonctionnaire public. Or, un homme, dans un instant d’emportement, aura manqué d’une manière grave à un fonctionnaire public, vous devez lui imprimer une note d’infamie ; mais devez-vous encore une fois lui imprimer pour cela la mort civile ? Après cela, je persiste à demander que dans le cas où la récidive ne porterait que sur un délit peu important, la peine infamante soit, en raison de la récidive, convertie en deux ans de détention » : Ibidem.
63 Jérôme Legrand, avocat du Roi à Châteauroux, était député du Tiers Etat du bailliage de Bourges : LEMAY (E.-H.), Dictionnaire des Constituants (1789-1791), Voltaire Foundation, Oxford, 1991, p. 574-575.
64 Archives Parlementaires de 1787 à 1860, op.cit., tome 26, p. 739-740.
65 Ibidem, p. 740. Suite à ce discours, l’Assemblée constituante charge son Comité de Constitution de lui proposer sans délai, ses vues sur les moyens de reconnaître les coupables qui auraient récidivé. Mais aucune proposition ne fut jamais faite au Comité à ce sujet.
66 CARBASSE (J.-M.), Histoire du droit pénal et de la justice criminelle, op. cit., p. 411.